vendredi 30 septembre 2011

Que C'est Triste (Interminable Sérénade Mexicaine Improvisée)


(pour éviter les tremblements au début du morceau, appuyer sur pause
le temps que le fichier soit entièrement chargé, puis relancer la lecture)

mardi 27 septembre 2011

Souricière


C'est la nuit. Je grossis. Lentement. Régulièrement. Millimètre après millimètre. Tout mon corps grossit à vue d’œil, de la barbe au cul. Je m’arrondis, mou comme un ballon, dense comme un boulet, je m’étends nord sud est ouest. Mes membres disparaissent, et bientôt la pièce, que j’absorbe en la débordant. Et l’immeuble et la rue. J’engloutis tout ce qui m’entoure dans une lente vague inarrêtable. Je ne vois plus mon corps, mais je vois toujours, j’avale tout sauf mes yeux. Et je grossis toujours. J’étouffe au ralenti. Je me noie de mers, je me gave de continents. Tout y passe, et la terre et la lune et des millions d’étoiles, trou noir avalant les trous noirs. Et puis, soudain, au milieu de nulle part, le mouvement commence à ralentir. Je grossis toujours, mais plus lentement. Puis je ne grossis plus. Une seconde, et le mouvement s’inverse. Je maigris. Mais je ne régurgite pas l’univers. Je suis une aspiration prise dans une aspiration. Je me compresse. Je m’assèche. Le mouvement s’accélère, je me resserre autour d’un axe qui semble être mon corps d’humain perdu, que je retrouve un instant flottant dans l’espace, mais que je perds aussitôt, une fois encore. Je suis une brindille, un fil, de plus en plus fin, infiniment fin, qui va rompre. Et non. Juste avant de me déchirer, à l’extrême ultime limite, le mouvement s’inverse encore, et je grossis à nouveau. Lentement. Régulièrement. A nouveau. Sans fin ? Prisonnier de cet éternel va et vient, je ne perds pas conscience. Je cherche. Mais aucune passerelle tombée du ciel n'offrira d'issue de secours, pas un cavalier pour un pas de côté, nulle botte secrète... Je reste là, ni mat, ni pat, fait comme un rat.
 

lundi 26 septembre 2011

Escalier



-       Je n’arrête pas de tomber sur l’escalier, le mot.
-       Dites-le sans jouer.
-       D’accord, je vois le mot « escalier » partout, je ne sais pas dans quel sens le prendre…
-       Et…
-       Je pense à Escher et je tourne en rond. Ok, j'arrête.
-       Ca a commencé comment ?
-       Quand Aomamé s’est échappée de la voie express au début de 1Q84. Depuis, le mot est partout, le mot et l’objet lui-même, évidemment. Dans la vie, dans mes rêves. Il était certainement là avant, mais je ne le voyais pas, pas spécialement, pas autant, enfin, vous voyez ce que je veux dire…
-       Et ça vous gêne dans la vie de tous les jours.
-       Jusqu’ici c’était juste une question sans réponse qui s’invitait quand elle voulait, mais depuis hier, avec le morceau de Radiohead, ça devient un peu handicapant, oui. Je reste devant la fenêtre et j’appuie sur Revoir à chaque fois. Je crois que c’est exactement la musique du mot. Ce que le mot me fait.
-      
-       Pour vous, ça sert à quoi un escalier ?
-       … A monter ou à descendre…
-       Vous connaissez son étymologie ?
-       Oui, j’ai regardé. Scala, échelle.
-       Et vous diriez que ça sert à quoi, une échelle ?
-       … A atteindre ?
-      
-       On ne cherche pas « quoi » tout de suite, j’imagine…
-       Je préférerais que vous me donniez le lien de la vidéo pour commencer.

samedi 24 septembre 2011

Bien Sûr, Rien Ne T'y Oblige

Ca commence sur les pavés de la rue des Orfèvres, blancs comme des miroirs dans le soleil rasant éblouissant. Pas un son, pas une voix, pas un oiseau. Il marche seul dans les rues vides, les yeux grands comme un touriste. C’est bien sa ville, mais sept ou huit siècles plus tôt. Pourtant, il ne panique pas, il estime même que ses chaussures en cuir et ses vêtements de toile devraient, par chance, relativement bien se fondre dans l’époque. Et les silhouettes recroquevillées au bas des maisons qui lèvent leurs yeux jaunes vers lui ont l'air d'avoir d'autres soucis. La peste ou le choléra, la famine plus probablement. Mais tous arrachent un sourire à la vie qui leur échappe et lui en font cadeau. Il n'en demande pas tant. Il ignorait qu'on pouvait survivre avec si peu de peau sur les os. Il pense au hasard. Il se dit que Paris a toujours été belle et qu'il fait bien trop bleu pour mourir aujourd'hui. Les cadavres sont nombreux, mêlés aux moribonds, mais personne ne pleure. Et pas d'odeur. Il se demande si cette étrange douceur doit autant à la mort qu'à la vie. Il ne sait pas vraiment ce qu'il veut dire.
Un vieil homme semble l'attendre au coin de la rue, dernier humain encore debout. L'homme lui rappelle immédiatement Merlin l'Enchanteur dans le film de Walt Disney, l'espièglerie en moins. Ou plutôt Vyasa dans le Mahabharata. Le vieil homme est aussi maigre que les autres, mais semble moins en souffrir, il lui indique dans un geste une porte ouverte sur un escalier qui conduit à un entresol. Dans l'immense pièce voutée, des victuailles en quantité suffisante pour nourrir la ville entière ont été disposées sur cinq ou six longues tables placées en enfilade. D'une voix étonnamment puissante, le vieil homme énumère : « Sangliers, faisans, ramiers, oiseaux de rivière, cercelles, buours, courtes, pluviers, francolys, cravans, tyransons, vanereaux, tadournes, pochecullieres, pouacres, hegronneaux, foulques, aigrettes, ciquoingnes, cannes petieres, oranges flamans (qui sont phoenicopteres), terrigoles, poules de l'Inde, coscossons et renfort de potages... » Puis après une courte pause, « Tout est pour toi, nous t'attendions. Tu dois tout manger. Seul. » 
Il n'y a rien à ajouter, aucune question à poser, seulement quelque chose à faire et c'est à lui de. Alors il mange toute la journée et toute la nuit, sans appétit ni écoeurement, mécaniquement, et au matin tous les plats de toutes les tables sont vides. 
Le vieil homme réapparaît avec le soleil et se dirige aussitôt dans une zone un peu plus sombre de la pièce. Là, il soulève une toile de jute informe qui découvre une jeune femme nue au corps sans bras ni jambe, au visage d'une pureté absolue noyé dans une chevelure de bête fauve. « Si tu pars avec elle, nous serons tous sauvés. Bien sûr, rien ne t'y oblige. Nous comprendrions... »
Ils ne comprennent rien. Elle est le contraire de la malédiction. Elle est le bouleversement, le seuil et le but. C'est Eurydice et il ne se retournera pas. Il la porte dans ses bras, il est le plus heureux des hommes depuis que la terre en porte. Et il a faim.
 

jeudi 22 septembre 2011

Qu'est-ce Que C'est (cette improvisation remercie Pierre Vassiliu)


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mardi 20 septembre 2011

Didier, l'Auto Rouge et l'Animal Absolu


Cette nuit, j'ai mangé Didier et l'Auto Rouge. 
Je ne suis pas tout à fait certain du titre, la couverture n’a pas fait long feu.
En vérité, j'avais déjà mangé Didier et l'Auto Rouge, il y a quelque temps, quand j'avais deux ans. Mais cette nuit, je l'ai partagé avec un ami. 
Mon ami est un animal qui aime les dessus de portes et les peintures idiotes, un renard aux yeux noirs d’encre qui savent rire et pleurer dans un même silence. En revanche, il mange goulûment, en grognant. C’est un animal paradoxal, forcément.
Parfois, il va s'asseoir dans des cinémas à côté d'un inconnu et il imagine très exactement les mêmes choses que moi. C’est là que j’ai dû le rencontrer, ou à la Librairie de Paris. Il lit beaucoup pour un écureuil. C'est un animal très attaché au style. Mais il peut se nourrir à l'occasion de livres qui en manquent, d’ailleurs, il a eu l'air d’apprécier Didier et l'Auto Rouge autant que moi. Je ne lui ai pas demandé, ça se voyait et ce n'était pas l'heure des questions. De toutes façons, il ne sait pas dire peut-être, il parle peu, il dit oui et quelques autres mots merveilleux.
La plupart du temps, il préfère se taire et je le comprends même si ça m'attriste. Certains jours, il fait parler des personnages, ça lui permet de jouer tous les rôles sans en choisir vraiment aucun, c'est son côté humain et c'est souvent très drôle.
Mais comme tous les vrais comiques, il n'est pas que drôle. En bon écureuil blond vénitien, c’est un romantique, un marcheur, qui peut parcourir cent lieues pour voir si son coeur bat plus fort au bord d’un autre chemin. Ce n'est pas malin, mais ça a un certain panache, de tête brûlée. Les écureuils blond vénitien sont une espèce très menacée, à vrai dire il n'en reste qu'un, et c'est un renard. Et il est fragile, évidemment. Pas comme Didier.
Didier enchaîne les tours de circuit au volant de sa magnifique auto rouge, le sourire aux lèvres, sans jamais commettre la moindre erreur. Et, bien sûr, il gagne à chaque fois. C’est une telle perfection, ils sont tellement bons, Didier et l'Auto Rouge, qu’on a été obligé de manger toutes les pages. Et la couverture. Après on a fait la sieste, allongé par terre sur le dos, et on est sorti de l’appartement en marchant au plafond pour que personne ne nous voie. Et c’est encore un matin. Et j'ai faim.



lundi 19 septembre 2011

Le Blues De La Lune (Improvisation Décousue)


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dimanche 18 septembre 2011

A Little Scared

"John's still got this stupid red flag planted in the head. Think he's a little scared."

mercredi 14 septembre 2011

Julien et l'Automatique


Les automobilistes sont nerveux ce matin. C’est à cause de la marée. La haute marée de la rue qui brouille tes traces. On ressent très bien ce genre de choses, ici, à Paris.
Je me souviens des rires à la fin des histoires drôles, mais jamais des histoires. Probablement par snobisme. Ou à cause de tout autre chose. Je n’ai pas renoncé à compter les jours. Trois cônes de chantier décalés au bout de la rue font surgir la fusée d’Objectif lune. Poêt-poêt petit Po8. Il fait beau et frais, un bleu d’hiver.  
A la fin de la saison, l’émoi et moi font chambre à part. C’est tellement triste depuis que tu ne pleures plus. 
Souviens-toi de l’archange qui terrasse le dragon.


dimanche 11 septembre 2011

Les Oursins

Le Sexe Des Oursins


Tu me fais penser qu’il y a des choses
Tellement plus importantes que
Quoi ?
Tu me fais penser à du pain
Plutôt perdu que quotidien
Tu me fais penser à des spaghettis
Cuits par la cousine de Johnny Boy
Tu me fais penser à du lait concentré
À tout ce qui reste toujours au fond du tube
Tu me fais penser à toutes ces figues
Qui mûriront sous d’autres doigts
Tu me fais penser qu’il y a des gens
Qui coupent le fromage n’importe comment
Tu me fais penser au sexe des oursins
Mais pas que

samedi 10 septembre 2011

A Case Of

 
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(improvisation avec groovebox, guitare, batterie et basse + effets ajoutés)

jeudi 8 septembre 2011

Combien Mesurez-Vous, Mademoiselle ?


Suivant les conseils de Léonard De Vinci

Je me tiens là
                    à une distance équivalant à deux fois la hauteur du modèle

                    à une distance équivalant à deux fois la hauteur du modèle
On pense être à l’abri

Mais l’attirance est infinie
                    à une distance équivalant à deux fois la hauteur du modèle

On ignore le sommeil
                    à une distance équivalant
On est un peu plus loin du ciel              à deux fois la hauteur du modèle
                                                             
Les genoux tremblent comme à treize ans
                    à une distance équivalant à deux fois la hauteur du modèle

                                              La tête vous tourne au ralenti
Vos cheveux passent au gris
                    à une distance équivalant à deux fois la hauteur du modèle



mercredi 7 septembre 2011

Tout Fait








“Je suis simplement arrivé à une conclusion, il y a assez longtemps. Il y a toujours quelque chose de "tout fait" dans un tableau : vous ne faites pas les brosses, vous ne faites pas les couleurs, vous ne faites pas la toile. Alors, en allant plus loin, en enlevant tout, même la main n'est-ce-pas, on arrive au ready-made. Il n'y a plus rien qui soit fait, tout est "tout fait".  Marcel Duchamp


lundi 5 septembre 2011

Roman (Espagnolade Improvisée)

 
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dimanche 4 septembre 2011

24 Hours A Day (The Clock de Christian Marclay)


Chaque extrait de film qui me ramène dans le passé de sa précédente vision (en même temps que dans son temps propre) me rappelle invariablement l’heure qu’il est maintenant quand je m’en souviens et qui n’est déjà plus puisque un nouvel extrait prend aussitôt sa place et me décale entre un autre hier et un perpétuel nouveau présent. Et je reste là, spectateur d’une fiction qui s’interdit de m’extraire totalement de la réalité tout en me permettant d’y échapper tant que je compte les heures que je passe avec elle.


 


The Clock est une œuvre vidéo d'une durée de 24 heures, spectaculaire, hypnotique, une horloge, un mécanisme cinématographique réglé avec précision pour indiquer l'heure en temps réel, synchronisé sur le fuseau horaire correspondant au lieu d'exposition. Grâce à la technique du fragment qui lui est chère, Christian Marclay orchestre des milliers d'extraits, puisés dans toute l'histoire du cinéma, des comédies en noir et blanc des années quarante aux séries B des années quatre-vingt-dix, des films d'avant-garde des années soixante aux films à suspense des années quatre-vingts et qui tous rendent visible le temps qui passe à travers une myriade de plans d'horloges, de réveils, d'alarmes, de montres, d'actions ou de dialogues illustrant cet implacable écoulement.
Le spectateur a alors l'impression d'assister à une fiction en temps réel. Ce qui relève d'un coup d'œil furtif sur les horloges devient ici une exploration illimitée de la nature illusoire du temps et de la façon dont nous l'appréhendons. Le son joue sa propre partition. Christian Marclay l'utilise comme un liant, une symphonie de sonneries, de tic-tac, de pas, de cris, rires et pleurs, de musique. Les équivalents formels entre le temps et la musique deviennent sensibles et The Clock devient une œuvre musicale, nous rendant captifs, aux aguets, de ses sonorités bruitistes qui se confondent avec notre propre pulsation. The Clock devient un gigantesque memento mori.
www.centrepompidou.fr

vendredi 2 septembre 2011

Yellowstone, France


Western Haïku n°14

Parfum de pop-corn
William Cody fait le clown
Sous la Tour Eiffel